Un poème de maître Daichi

Paul Hōjō Pichaureau

20 janvier 2023, 19 h

Maître Daichi est un moine zen qui vivait au début du XIVème siècle au Japon. Il avait reçu l'ordination de maître Keizan, au tout début de l'école sōtō. Il est connu pour ses calligraphies et ses poèmes que Kōdō Sawaki a rassemblés et commentés, que Maître Deshimaru a traduit en français et commenté intégralement, que Philippe Coupey a commentés aussi pendant quinze ans.

« Enseignement à certaines personnes »

À midi je sortirai mendier ma nourriture, Le soir je retournerai dans la forêt et ferai zazen paisiblement. Le moine doit pratiquer intimement la voie des anciens Les tissus du kesa suivent la manière transmise par Mahakashyapa

À midi je sortirai mendier ma nourriture Le soir je retournerai dans la forêt et ferai zazen paisiblement

Ça c'est la manière de Mahakashyapa. En fin de matinée, aller de village en village avec son bol à aumônes, manger ce que l'on nous a donné, puis se retirer dans la forêt pratiquer zazen.

Mahakashyapa est réputé dans notre école pour la pratique assez ascétique. Il pratiquait les douze dhatu[1] nous dit maître Deshimaru. Douze règles de comportement particulièrement ascétiques par rapport aux normes de la sangha. Par exemple : manger une seule fois par jour, même la nuit ne pas s'allonger, dormir assis ou faire kinhin, autant que possible rester ou s'allonger sur la route, ne pas souhaiter s'allonger sous les arbres ou dans la plaine, etc.

Bouddha lui-même recommandait à Mahakashyapa de ne pas avoir un comportement si différent des autres moines. Et pourtant c’est Mahakashyapa qui a reçu la transmission dans notre école, c’est lui notre premier patriarche.

(Silence)

Chacun a son karma, chacun pratique « gyōji » avec son karma. Gyōji : « gyō » la pratique, « ji » la quotidienneté, la répétition. Gyōji c’est notre pratique incessante, qui fait que nous approfondissons la voie, ce qui fait que petit à petit notre vie quotidienne est marquée par le zen, nos manières, nos pensées, nos paroles, c’est notre gyōji.

Le gyōji de Mahakashyapa était marqué par son passé de brahmane. Celui de Kōdō Sawaki était différent, celui de Deshimaru différent, Philippe, Gérard, qui vous voulez. André Meissner était présent à chaque zazen, Claire venait à chaque zazen, même quand elle travaillait, c’était leur gyōji, leur karma.

(Silence)

Dans la pratique de zazen, notre karma, nos conditionnements hérités de notre éducation, de la vie que nous avons menée, de la vie que nous menons, devient notre pratique, elle fournit un aliment à zazen comme la bouse de vache peut être le carburant d’un grand feu. Cela fournit aussi une forme à notre pratique, un support, des outils, des moyens. Et il n’y a que nous-mêmes qui sommes capables d’opérer cette transformation, du karma à la pratique, du karma à l’approfondissement de la voie, gyōji.


  1. « Règles de comportement » (sanscrit). On dit aussi dhutanga. ↩︎

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