Sandōkai (5)

Paul Hōjō Pichaureau

4 novembre 2023, 9 h

Suite du Sandōkai que je commente en ce moment :

Les quatre éléments retournent à leur origine comme l'enfant retourne à sa mère.

L'origine des éléments c'est kū. On pourrait dire shunyata, le vide, l'indéterminé.

Comme les maîtres, comme maître Deshimaru par exemple, ne commentent pas ce vers, il faut suivre son intuition. Mon intuition est que ce vers parle de mujō, l'impermanence. Là, maintenant, tout de suite.

On peut avoir le sentiment, dans notre société, de ne pas tellement être exposé à mujō. On allume la télé et on se fait peur face à des gens qui se lèvent le matin, prennent le petit déjeuner et une heure plus tard tout le monde est mort. Nous, on ferait plutôt des projets sur l'avenir. On voit notre vie comme une grande valise, dans laquelle on essaie de mettre plein de choses pour faire face à l'avenir. Selon qu'on est peureux ou enthousiaste on y mettra des choses différentes mais le mouvement est le même.

En réalité, on reste toujours l'enfant qui ne contrôle rien. Balloté par les évènements, balloté par les désirs contradictoires des gens autour de nous et de nous-mêmes. Chaque instant l'univers s'invente, se crée, apparaît. À chaque instant l'univers se détruit, disparaît, s'évanouit.

À chaque instant l'univers est au bord de la falaise. Et pratiquer zazen c'est s'habituer à cet état, s'habituer à ce mélange de peur et d'enthousiasme, à ce mélange d'inquiétude et de certitudes de celui qui se promène au bord de la falaise.

Dans cet état d'esprit, vraiment, à quoi ça sert d'avoir rempli sa valise ?

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